Edition fort rare de la « Logica » d’Aristote donnée à Paris en 1536
par le libraire-humaniste Jean Petit.
Magnifique exemplaire de Bernhardus Rascher qui a calligraphié la date de 1544 sur le volume,
conservé dans sa belle reliure de l’époque en peau de truie estampée à froid.
Paris, 1536.
Aristoteles (384-322 av. J.C.). Logica. Libri logicorum ad archetypos recogniti…
Paris, Jean Petit, 1536.
In-folio, 271 ff. et 1 f. de marque (qq. erreurs de pagination mais bien complet). Peau de truie estampée à froid, attaches de laiton et fermoirs, dos à nerfs. Reliure de l’époque.
326 x 207 mm.
Aristotle’s most influential foundational texts on logic in a beautiful contemporary pigskin over wooden board, richly rollstamped and with 2 brass clasps.
With woodcut title border and numerous woodcut diagrams and figurative and ornamental metal and woodcut initials in the text, at end with large woodcut printer’s device.
“Suit l’édition de 1531, n°26.
Avignon. Barcelone, BU. Berlin, SB. Fribourg, BCU. Gênes, BC (incomplet du titre). Genève, BPU. Lisbonne, BN. Munich, BSB. Pamiers. Poitiers, BU. Saint-Dié ». (Renouard, ICP, V, 23)
Edition importante, avec une pièce liminaire de Jacques Lefèvre d’Etaples, paraphrase de la préface de Porphyre à son disciple Chrysaorius., imprimée par Jean Petit, sur les presses de Pierre Vidoue.
Jean Petit, imprimeur au début du XVIe siècle, était l’un des quatre principaux libraires de l’Université de Paris et a grandement contribué à la diffusion de l’humanisme du début de la Renaissance. Il a publié un grand nombre d’éditions originales. Parmi ses collaborateurs figuraient Robert Estienne et Josse Bade. Petit était un exemple d’un premier imprimeur prospère.
Dans son cours de Logique, Kant écrivait ceci : « La logique actuelle provient de ‘l’analytique’ d’Aristote. Ce philosophe peut être considéré comme le père de la logique ».
Aristote (384-322 av. J.-C.) est certes le père fondateur de la logique classique, mais il est également à mon sens largement à l’origine de la philosophie occidentale du langage. Dans la théorie aristotélicienne, logique et langage sont en effet étroitement liés, au sein d’une vaste organisation des savoirs. Heidegger ne manque pas de signaler que « […] c’est à Aristote lui-même qu’on doit une interprétation métaphysique plus distincte du Λογος conçu comme la proposition. […] Cette conception de l’essence du Λογος est devenue exemplaire et normative ultérieurement pour la constitution de la logique et de la grammaire ».
La théorie d’Aristote a connu un immense succès. Au fil du temps, elle a influencé aussi bien les rationalistes et les idéalistes que les empiristes et les réalistes.
Aristote demeure une référence fondamentale, au moins sous l’angle d’une histoire de la pensée et même, pourrait-on dire, d’une histoire de la pensée réflexive, autrement dit celle qui prend ses propres mécanismes pour objet d’étude.
On sait que les différents textes d’Aristote portant sur les questions de logique ont été regroupés en un vaste ensemble appelé Organon (littéralement : outil, instrument). Cela nous donne six traités logiques : les Catégories, traité qui étudie les termes constitutifs de la proposition ; De l’interprétation, qui étudie les propositions, c’est-à-dire les combinaisons de termes ; les Premiers analytiques ou étude analytique du raisonnement et de sa forme principale, le syllogisme, et les Seconds analytiques, qui étudient plus particulièrement le syllogisme scientifique, ces deux traités constituant l’étude des relations interpropositionnelles, étude qui suit naturellement celle des propositions ; ensuite, les Topiques, en fait probablement rédigés avant les Premiers analytiques et les Seconds analytiques, et qui proposent une méthode d’argumentation à partir de prémisses probables ; enfin les Réfutations sophistiques, qui ont pour objet de démonter les mécanismes des réfutations des sophistes, autrement dit les paralogismes dont ils sont coutumiers.
L’apport d’Aristote à la philosophie, à la logique et à l’analyse du langage est considérable. Ce fait est connu et relève presque du lieu commun, mais encore convient-il de le montrer à chaque époque en relisant son œuvre à la lumière des progrès ou des innovations dans le monde de la pensée. N’oublions pas d’ailleurs que cette appréciation ne fait pas l’unanimité. Il est en tout cas frappant de constater que le débat entre platoniciens et aristotéliciens demeure dans le monde scientifique (chez les mathématiciens, par exemple). Le maître, Platon, et le disciple, Aristote, qui s’est affranchi du maître pour remettre les choses sur leurs pieds et réhabiliter le monde sensible, restent finalement deux références majeures encore aujourd’hui.
Quant à l’Organon, il représente le premier corpus important traitant de la logique et du langage de manière systématique. C’est, malgré les critiques et les épreuves du temps, malgré l’évolution nécessaire de la pensée, une œuvre centrale qui a inspiré les logiciens, les philosophes du langage et les linguistes, souvent à leur insu, et jusque dans la grammaire scolaire depuis ses origines antiques. La fécondité de la méthode aristotélienne ne se dément pas et les débats qu’elle a instaurés sont loin d’être clos ou périmés. Même pour nos contemporains, l’Organon demeure une cathédrale de la logique classique.
Magnifique exemplaire de cette édition fort rare conservé dans sa belle reliure de l’époque en peau de truie estampée à froid sur ais de bois, provenant de la bibliothèque de l’humaniste Bernhardus Rascher avec la date calligraphiée de 1544.