Florence, Bartolommeo Sermartelli e fratelli, 1610.
Petit in-folio de 51 pages illustrées de 26 eaux-fortes, grandes armoiries sur le titre, restauration en marge du titre et ex libris anciennement découpé. Maroquin rouge, filet à froid autour des plats, dos à nerfs, coupes décorées, roulette intérieure, tranches dorées. Reliure du XIXe siècle.
263 x 193 mm.
Rarissime édition originale et premier tirage de cette suite illustrant la vie du roi Henri IV (1553-1610).
Cicognara 1413; Gamba 2750; Moreni I:442; Ruggieri 359.
Cet ouvrage fut édité pour commémorer les funérailles du roi Henri IV organisées par les Médicis dans l’église San Lorenzo de Florence.
En 1610 paraissait à Florence un livret illustré de Giuliano Giraldi intitulé Esequie d’Arrigo quarto Cristianissimo Re di Francia e di Navarra Celebrate in Firenze dal Serenissimo Don Cosimo II Granduca di Toscana (Florence, Bartolomeo Sermartelli, 1610). La mort d’Henri IV avait en effet donné lieu à l’une de ces imposantes cérémonies funèbres dont les Médicis s’étaient fait une spécialité, cérémonie dont l’ouvrage de Giraldi perpétuait le souvenir. Les eaux-fortes signées par Alovisio Rosaccio (un graveur et marchand d’estampes florentin élève de Tempesta) reprenaient en les simplifiant, mais de façon parfaitement reconnaissable, les sujets peints pour le service solennel donné le 16 septembre 1610 en la cathédrale San Lorenzo de Florence.
Florence reçut la nouvelle de cette mort soudaine le 23 mai, et toute la cour se mit en deuil. Le grand-duc Cosme II, qui avait succédé en 1609 à son père Ferdinand Ier, décida de rendre au monarque défunt un hommage solennel sous la forme de funérailles in effigie en l’église San Lorenzo.
Cette cérémonie s’inscrivait dans la pratique des imposants rituels funèbres à forte signification politique dont les Médicis s’étaient fait une spécialité et dont San Lorenzo fut aussi le théâtre pour honorer Philippe II roi d’Espagne, en 1598, ou, plus tard, Marguerite d’Autriche en 1612.
Cette célébration, l’un des premiers actes du principat du jeune Côme II, réaffirme l’alliance entre la France et les grands-ducs de Toscane, depuis le mariage de Marie de Médicis avec le Béarnais en 1600.
En 1610, il s’agissait non seulement d’attester le lien entre les deux dynasties, renforcé par le mariage en 1600 de Marie de Médicis et d’Henri IV, mais aussi et surtout de souligner la légitimité de la régence de Marie et du droit de Louis XIII à la succession.
Parce qu’une telle solennité devait avoir une large résonance, des personnages de premier plan furent associés à son organisation ; Giulio Parigi (1571-1635), architecte et ingénieur de la cour de Florence, fut ainsi chargé de la scénographie. La commémoration en grande pompe eut lieu le 15 septembre 1610 ; pour décorer l’intérieur de la basilique, vingt- six grandes toiles en grisaille évoquant les hauts faits et les vertus du roi furent disposées sur la contre-façade et le long de la nef, entièrement revêtue d’ornements de deuil et théâtralement éclairée par une énorme quantité de chandelles.
Les vingt-six grandes toiles sont exécutées par des artistes toscans proches des Médicis, parmi lesquels Jacopo da Empoli, Bernardino Poccetti ou Francesco Curradi : un véritable travail collectif qui habilla très temporairement les murs de la basilique San Lorenzo, toute drapée, pour la circonstance, de tentures funèbres. Cet ensemble, bien que de présentation éphémère, eut pourtant une réelle influence : il fut source d’inspiration pour la série de peintures de Rubens commandées par Marie de Médicis pour la décoration du Palais du Luxembourg.
Pour Henri IV, le contenu des vingt-six peintures principales privilégie une recherche de réalité historique excluant tout recours à la fable ou aux artifices mythologiques.
Le texte s’ouvre sur une oraison de Côme II de Médicis, grand-duc de Toscane, puis vient la suite des 26 gravures accompagnées chacune d’une légende en latin et d’un texte explicatif en italien.
« Les vingt-six épisodes peints décrivant les hauts faits du monarque et complétant la décoration funèbre de l’église ont été transcrits en autant de cuivres (rami bellissimi) pour la description imprimée donnée par Giuliano Giraldi aux presses de Bartolomeo Sermartelli dès septembre 1610. Dans leur fonction d’exemplarité moralisatrice, ces morceaux choisis constituent l’un des premiers cycles retraçant dans son ensemble la geste henricienne, et tels ils se revendiquent si l’on en croit Giuliano Giraldi : ‘Ma quello, che più d’ogni altra cosa moveva gli huomini a maraviglia, e la grandezza chiariva di questa perdita, si era una scelta delle più segnalate prodezze del re Arrigo’. Le même Giuliano Giraldi nous indique en outre que l’église fut ouverte au peuple ‘a] goder della vista dell’apparato’ comme d’un éphémère édifiant destiné à survivre dans la mémoire de la cité ».
Précieux exemplaire de ce rare ouvrage du plus haut intérêt historique et artistique conservé dans sa reliure en maroquin rouge du XIXe siècle.