Paris, 1776.
In-8 de (2) ff., 126 pp. Plein veau marbré, double filet or encadrant les plats, dos à nerfs orné de fleurons dorés, filet doré sur les coupes, tranches marbrées. Reliure de l’époque.
196 x 123 mm.
Edition originale de cet ouvrage dans lequel Voltaire « répond aux attaques de M. de Pauw sur les origines du peuple chinois, le christianisme en Chine, les sciences et les arts chinois… » (Song, Voltaire et la Chine).
Corneille de Pauw, chanoine de Xanten, qui vivait à la cour de Prusse, avait publié, en 1772, des Recherches philosophiques sur les Egyptiens et les Chinois (2 volumes in-8) et dans ces recherches les Chinois n’étaient pas ménagés.
Voltaire, qui avait toujours glorifié cette nation, s’avisa de répliquer à Paw.
A la fin de 1775, il annonce à Frédéric des lettres qu’il a « pris la liberté d’écrire à M. Pauw sur ses Chinois, ses Egyptiens et ses Indiens ». Frédéric lut cette lettre à l’abbé Pauw : « Il a été pénétré, mande-t-il à Voltaire, le 10 janvier 1776, des choses obligeantes que vous écrivez sur son sujet ; il vous estime et vous admire, mais je crois qu’il ne changera pas d’opinion au sujet des Chinois ».
Ces lettres ne sont donc pas un pamphlet ; de Paw en tira même vanité. Elles parurent en février 1776.
« Malgré toutes ses erreurs, le témoignage de Voltaire est respectable : son admiration pour la Chine s’imposant par ses idées mille fois répétées fit retrouver à la Chine sa juste place dans l’histoire universelle, diffusa la pensée chinoise, contribuant ainsi à la Révolution de 1789 ». (Trousson, Dictionnaire général de Voltaire).
« Les Lettres Chinoises, Indiennes & Tartares sont adressées à monsieur Pauw, ce chanoine de Breslau, qui a publié des idées si nouvelles & si étranges sur la Chine & les Egyptiens. C’est d’un bénédictin dont monsieur Voltaire emprunte aujourd’hui le froc, & il observe en cela le costume, attendu le scientifique de la matiere : mais il ne le suit pas longtemps, car il effleure dans quelques pages des sujets qui auroient fourni au moine des in-folio […]
Le première des ‘Lettres’ roule sur un poëme de l’empereur Kien-Long, souverain actuel de la Chine ; il a pour titre ‘Moukden’, & est en vers. Dans la seconde, on rapporte des prétendues réflexions d’un autre bénédictin, nommé dom Ruinart, auteur des ‘Actes sinceres’, recueil de contes miraculeux fort singuliers… La troisième est adressée à M. Pauw, sur l’athéisme de la Chine, & l’auteur penche pour l’affirmative. La quatrième est une plaisanterie sur l’opinion que l’ancien christianisme n’a pas manqué de fleurir à la Chine. La cinquième regarde les loix & les mœurs de cet empire, que l’écrivain admire. Les disputes des révérends peres jésuites à la Chine fournissent matière aux plaisanteries de la sixieme, continuées dans la septieme sur la fantaisie qu’ont eu quelques savants d’Europe de faire descendre les Chinois des Egyptiens, & mieux encore dans la huitième sur les dix anciennes tribus Juives qu’on dit être à la Chine. L’auteur parle un peu plus sérieusement dans la dixieme, où il s’étend sur le ‘Shafta-bad’, livre des brachmanes, le plus ancien qui soit au monde. Il parle aussi du ‘Veidam’, dont il rapporte des impertinences. Le paradis terrestre de l’Inde est fort exalté dans la dixieme, & le grand Lama réputé immortel est l’objet de la onzieme. Enfin la douzieme se rapproche de nous ; il est question du Dante & d’un pauvre homme nommé ‘Martinelly’ ; c’est un traducteur de l’Italien que monsieur de Voltaire n’aime pas.
‘Un dialogue de Maxime de Madaure’, avec une notice concernant ce philosophe Africain, contemporain d’Apulée, & ami de Saint Augustin, vient après ces lettres. C’est un ouvrage philosophique rempli d’une excellente morale, & où l’on apprend la science difficile de vivre & de mourir. On ne peut que féliciter monsieur de Voltaire sur la découverte de cette maxime, qu’on ne connoissoit guere, non plus que son œuvre. » (Mémoires secrets pour servir à l’histoire de la République des Lettres, IX, 1784)
Bel exemplaire de cette rare édition originale de Voltaire qui révèle son opinion sur la Chine et le peuple chinois, conservé dans son élégante reliure de l’époque.