Paris, Jean Ribou, 1667.
In-12 de (12) ff. y compris le frontispice et 84 pages. Maroquin cuivre, double filet doré encadrant les plats, dos à nerfs orné des mêmes doubles filets, double filet sur les coupes, dentelle intérieure, tranches dorées. Reliure signée de Brany.
143 x 88 mm.
Précieuse édition originale très rare, de l’un des chefs-d’œuvre de Molière.
Tchemerzine, IV, 781.
« L’édition originale du Misanthrope est très rare et très appréciée des bibliophiles » Guibert, Molière, p. 188.
Elle contient « L’Avis au Libraire et Lecteur » émanant de Molière et une « lettre écrite sur le Misanthrope » par Donneau de Visé.
« La figure frontispice, intéressante car elle représente Molière interprétant le rôle du Misantrope, manque assez souvent aux exemplaires » (Guibert).
La pièce fut donnée pour la première fois au Théâtre du Palais Royal le 4 juin 1666. Elle fut jouée à partir du 6 août 1666 accompagnée du « Médecin malgré lui ».
Molière tenait le rôle d’Alceste et sa femme, celui de Célimène.
« Dans ce pur chef-d’œuvre l’introspection psychologique tenait une place considérable. Psychologie de l’homme amoureux qui se croit bafoué et qui raille sa propre infortune, psychologie de l’homme honnête et sincère qui décèle le mensonge universel et qui en souffre avec une visible indignation. »
Dans le Misanthrope,, les passages qu’on mettait en valeur et qu’on applaudissait étaient ceux où Alceste lance des boutades contre les juges, la Cour et la ville.
Avec le romantisme, le personnage subit une nouvelle interprétation. Alceste, torturé par Célimène, devint une sorte de héros ténébreux, victime de sa passion, et sa maîtresse le mauvais ange qui le torture. C’est à propos du Misanthrope que Musset, dans Une soirée perdue, reconnaîtra cette « mâle gaieté, si triste et si profonde que, lorsqu’on vient d’en rire, on devrait en pleurer ». Au fur et à mesure qu’Alceste devenait, non pas plus sympathique (il l’était aussi aux spectateurs du XVIIè siècle) mais plus admirable, plus digne d’être pris pour modèle, Philinte, devenait plus suspect. Molière en avait fait l’honnête homme type, il n’est plus chez Fabre d’Eglantine qu’un odieux égoïste et, dans La Conversion d’Alceste de Georges Courteline, qu’un détestable hypocrite qui trompe son ami. Il y a donc eu dans le personnage d’Alceste, au gré des circonstances politiques et littéraires, suivant les transformations de l’esprit public, une évolution qui n’est d’ailleurs pas un contresens, puisque tous ces éléments existent dans la pièce ; mais, alors que certains côtés du caractère se sont presque effacés, d’autres aspects, auxquels l’on n’était guère sensible au XVIIè siècle, se sont simplifiés et exagérés. Ceci ne fait que démontrer l’extraordinaire vitalité de la comédie.
Fort bel exemplaire de l’une des pièces majeures de Molière, bien complet du frontispice qui manque parfois, revêtu d’une élégante reliure en maroquin cuivré.
De la bibliothèque Jean Amadou.